Les rencontres d’après minuit – Yann Gonzalez

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Une nuit, quelque part. Une moto. Un homme conduit une femme. Ils arrivent devant un immeuble. Dans un appartement, un homme travesti en gouvernante et un jeune couple accueillent les invités. Ils arrivent au fur et à mesure, « La Chienne », « L’Etalon », « L’Adolescent », « La Star ». Ils viennent pour une partouze, la parole se libère et les souvenirs reviennent après minuit…

Dès les premières images, le spectateur se retrouve illico dans un univers poético-fantastique et embarque pour un voyage qui le transporte dans une dimension où le cinéma peut tout se permettre. Cette moto qu’enfourche le couple de la première scène nous renvoie tout autant au cinéma psychédélique fétichiste de Kenneth Anger, qu’à Alain Delon et Marianna Faithfull, dans cette curiosité qu’est La Motocyclette de Jack Cardiff, qu’a Alain Robbe-Grillet et a sa Belle Captive.

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Réunis dans le huis clos de l’appartement, le voyage débute. Chaque convive s’imagine et se dévoile aux autres. Ils se racontent, et on pense à Pasolini et à sa trilogie de la vie (Le Décaméron, Les Contes de Canterbury, Les Mille et une nuits), ces interruptions de l’histoire pour nous narrer une autre « réalité », qui enfin de compte constitue le film.

« L’Etalon », le meilleur rôle d’ Eric Cantona à ce jour, est amoureux et  victime de son majestueux pénis. « L’Etalon » se lance dans l’étrange aventure arrivée quelques heures auparavant. Arrêté et mis en cage par deux flics pervers, il doit se soumettre à une Béatrice Dalle, travestie en Dyanne Thorne de la série des Ilsa. 

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Travestissement encore avec « La Star » Fabienne Babe en troublante Catherine Jourdan, véritable apparition de l’au-delà de la très érotique égérie d’Alain Fleischer, entre ombre et lumière, elle se confie… puis comme en une réappropriation de son corps et de son image, « La Star » retire sa perruque, sans fard, sans maquillage, elle devient une autre elle-même.

Nous pourrions passer en revue toutes les interventions, mais cela réduirait le plaisir de la découverte.

Les Rencontres d’après minuit, nous emporte par la beauté de ces dialogues qui oscillent entre une approche à la Jean Rollin (réalisateur du Viol du vampire, des Lèvres de sang) et le spleen du nouveau roman. Ajoutons à l’enchantement les remarquables « bouts » de décors intemporels de Sidney Dubois au diapason de la vision poétique de Yann Gonzalez, navigant entre ceux de la Hammer, du drame tragico-comique moyenâgeux Silvestre de Joao Cesar Monteiro et ceux cosmiques  d’Oliveira pour Le Soulier de Satin.

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Yann Gonzalez pour son premier film, parcouru d’excellentes références, construit son propre univers, cohérent, magique et singulier. L’admirable fin sur une route de campagne aux premières lueurs du jour, nous ouvre un espoir teinté de nostalgie sur un futur à bâtir… et un cinéaste en devenir…

Fernand Garcia

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Les rencontres d’après minuit, un film de Yann Gonzalez avec Kate Moran, Niels Schneider, Nicolas Maury, Eric Cantona, Fabienne Babe, Alain Fabien Delon, Julie Brémond, Béatrice Dalle, Jean-Christophe Bouvet. Scénario : Yann Gonzalez. Photo : Simon Beaufils. Décors : Sidney Dubois. Costumes : Justine Pearce. Montage : Raphaël Lefèvre. Musique : M83. Productrice : Cécile Vacheret. Production : Sedna Films avec la participation du CNC et avec le soutien de la Réfion Pays de Loire. Distribution : Potemkine Films. France. Couleur. Format image : 1,66. 2013. 92 mn. Semaine de la Critique – Cannes 2013. Interdit aux moins de 12 ans.