La Dernière orgie du IIIème Reich – Cesare Canevari

Le premier plan a de quoi surprendre: un panoramique nous mène sur une route où nous saute aux yeux une glissière de sécurité ! Anachronisme!, s’écrie le spectateur, le film n’est qu’un navet. Sur la bande-son, un enregistrement des minutes du procès d’un responsable de camp de concentration. Pendant qu’une survivante égrène les atrocités dont sa sœur a été victime, une Mercedes roule à vive allure. Contrairement à notre première impression, l’action se déroule donc après la Seconde Guerre mondiale. Nous voilà rassurés, le film n’est pas un navet et bénéficie d’un scénario. Au volant, Konrad Von Starker, le commandant du camp disculpé dans la bande-son. Il va rejoindre une ancienne prisonnière Lise Cohen. Ils se retrouvent dans les ruines du camp. Le film plonge dans un long flash-back qui nous mène en 1943. Konrad est en charge du camp, quand Lise sort d’un convoi.

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Lise ne veut pas vivre contrairement aux autres prisonnières. Pour Lise, la vie n’a plus aucune saveur. Dans sa perversité, Konrad ne peut supporter l’idée que quelqu’un puisse mourir volontairement sans supplication. Une relation SM va naître entre le geôlier et sa prisonnière. Évidemment ce rapport maître/esclave entre un nazi et une juive trouve sa source d’inspiration dans Portier de Nuit (1974) de Liliana Cavani, mais Adriano Micantoni et Daniela Poggi ne sont ni Dirk Bogarde ni Charlotte Rampling pourtant ils s’en sortent plutôt bien. Micantoni surjoue l’officier mais arrive à trouver le ton juste. Quant à Poggi, elle donne de sa personne, suspendue nue par les pieds ou les poignées, ligotée au sol, etc. elle résiste avec froideur et détermination aux humiliations les plus extrêmes. Le couple fonctionne à l’écran et c’est bien le plus important.

Cesare Canaveri s’applique à la mise en scène, il donne une vraie dynamique à ses plans par une combinaison de mouvements d’appareils, de zoom et d’un montage rapide. Réalisateur peu connu, on lui doit un excellent western européen le gauchissant Matalo, redécouvert cette année chez Artus Films. La Dernière orgie du IIIème Reich s’inscrit dans l’un des genres le plus sulfureux et malsain du cinéma Bis, la Nazisploitation.

Pour éviter toute méprise sur ses intentions, Canavari prend d’emblée position de manière assez grossière quoique parfaitement efficace, ainsi dans la scène du gymnase Cavanari ponctue le discours de Konrad aux jeunes soldats en rut de pets et d’un doigt dans l’anus dont le « aïe » renvoie aux « Heil Hitler ! »

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Scène du gymnase, qui soit dit en passant est un duplicata de celle de Salon Kitty (1976) de Tinto Brass avec des moyens bien moins importants et surtout sans l’apport d’un décorateur de génie Ken Adam.

Évidemment cette mise à distance lui permet de dérouler les pires atrocités et de jouer dans l’outrance. Canevari pousse ses interprètes aux limites du grotesque. La grande séquence du film réunit tous les dignitaires du camp autour d’un repas. S’exprime alors un professeur au discours délirant. Celui-ci en arrive à la conclusion que pour obtenir de bons aryens il faut manger des Juifs ! Le cannibalisme comme survie du régime. La scène se poursuit par la mise en pratique des théories du professeur. Séquence est en partie amputée lors de son exploitation en France.

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L’édition DVD d’Artus Films offre dans la partie supplément une fin alternative très intéressante, elle a la particularité d’exister comme élément sonore sur le générique de fin de la version finale. Cette fin prolonge la dernière scène faisant ainsi sortir le film du « romantisme » pour l’entrainer vers une sorte de justice morale, séparant bourreau et victime. La Dernière orgie du IIIème Reich dans les limites crapoteuses du genre fait presque œuvre d’originalité.

Fernand Garcia

la-derniere-orgie-du-iiieme-reich-dvdLa Dernière orgie du IIIème Reich est édité en DVD par Artus Films dans la Collection Guerre et Barbarie, contrairement à d’autres titres d’Artus celui-ci ne bénéficie pas d’une analyse par un spécialiste mais propose dans les « Suppléments » la fin alternative (voir plus haut), un Diaporama d’affiches et photos ainsi que les films-annonces de la collection « Guerre et Barbarie » (La Dernière orgie du IIIème Reich, Holocauste Nazi, Horreurs NaziesLe Camp des filles perdues).

La Dernière orgie du IIIème Reich (The Gestapo’s Last Orgy) un film de Cesare Canevari, avec Marc Loud (Adriano Micantoni), Daniela Levy (Daniela Poggi), Maristella Greco, Fulvio Ricciardi, Antineska Nemour, Caterina Barbero… Scénario : Antonio Lucarella. Directeur de la photographie : Claudio Catozzo. Décors Ettore Lurà. Montage : Enzo Monachesi. Musique : Alberto Baldan Bembo. Production : Cine Lu. Ce. Italie. 1977. 92 mn. Versions : français, italien. Sous titres : français Format 1.77 original respecté 16/9ème compatible 4/3. Couleur. Interdit aux moins de 16 ans.