John Huston

De son premier chef-d’œuvre Le faucon Maltais en 1941 à son dernier, Les Gens de Dublin en 1987, que de films fabuleux en 48 années de cinéma! John Huston est une légende. Il est l’auteur d’une œuvre exceptionnelle qui couvre quasiment tous les genres.

Le Faucon Maltais

Fils de l’acteur Walter Huston, il débute comme réalisateur à la Warner Bros. avec l’adaptation d’un roman noir Le faucon Maltais. On trouve déjà dans ce premier essai tout ce qui fera le cinéma d’Huston. Cette approche est populaire, travail dans un genre, et intellectuelle. Les thèmes qu’il développera par la suite y sont présents : la violence, la solitude, le déracinement, l’absurdité de la vie et cette poésie tragi-comique qui va constituer le cœur de son œuvre.

Sa vie et son œuvre se confondent et renvoie l’une à l’autre. Né le 5 août 1906 à Nevada dans l’État du Missouri, John Huston suit son père de ville en ville au gré des tournages. Ses études sont chaotiques, il abandonne l’université pour devenir boxeur professionnel. Il renonce à ce métier et devient acteur dans de petites formations de théâtre amateur. Une vie de vagabond qui le conduit au Mexique où il s’engage dans la Cavalerie. Il quitte assez rapidement l’armée avec le grade d’Officier.

De retour aux États-Unis, Huston se lance dans l’écriture. Il écrit des pièces et des romans qui ne seront pas publiés. Parallèlement, il gagne sa vie en effectuant toutes sortes de petits boulots : chasseur, pêcheur… Il rédige des articles pour la presse et côtoie le monde du journalisme. John Huston passionné par la peinture, entreprend un voyage en Europe pour étudier l’Art des grands peintres. Ce goût pour la couleur se retrouvera dans ses films où il n’hésitera pas à innover avec des procédés cinématographiques étonnants comme le tirage or de Reflets dans un œil d’or. John Huston est l’un des maîtres de la couleur au cinéma.

De tous ces voyages aux États-Unis ou en dehors, Huston gardera toujours l’envie d’ailleurs, d’aller à la découverte des hommes, des lieux et de l’histoire. De retour aux États-Unis, il se retrouve en charge d’une revue d’Art, Midweek Pictorial. En 1931, il intègre le staff des scénaristes de la Warner. Pendant dix ans, il travaille pour de grands cinéastes : William Wyler, Howard Hawks, Raoul Walsh…

Le trésor de la Sierra Madre

En 1945, il réalise un documentaire sur les soldats en traitement à la suite de traumatismes. Let There Be Light, ce prodigieux témoignage, est interdit et ne sera « distribué » qu’au début des années 80. Le Trésor de la Sierra Madre, lui permet de diriger son père dans une œuvre d’une incroyable noirceur. Le film permet à Walter Huston de recevoir l’Oscar du meilleur acteur dans un second rôle, et John Huston repart de la cérémonie avec deux statuettes : meilleur réalisateur et scénariste-adaptateur.

Gregory Peck Moby Dick John Huston

Il signe avec Quand la ville dort (The Asphalt Jungle, 1950) un chef-d’œuvre absolu du film noir et une date dans l’histoire du cinéma. Son film marquera profondément plusieurs générations de cinéastes. Avec son adaptation de Moby Dick (1956), Huston tente de fusionner la vie américaine contemporaine avec la mythologie universelle sous-jacente à toutes les civilisations. Le film déchaîne les passions, Huston est traîné dans la boue par une partie de la critique pour s’être attaqué à un monument de la littérature mondiale. Pourtant, Moby Dick est de bout en bout passionnant. Gregory Peck y donne sa meilleure performance d’acteur de sa carrière. L’ampleur de l’ambition de John Huston force le respect. Il faudra des années avant que la critique ne révise son jugement. John Huston poursuit dans cette optique avec Les Désaxés (The Misfits, 1961), qui analyse comment la mythologie s’inscrit au sein d’une société faite d’épaves humaines.

John Huston peut se ranger dans la catégorie des cinéastes indépendants. Il tourne aussi bien aux États-Unis, qu’au Mexique, qu’en Afrique ou en Europe. Dans son souci d’indépendance, Huston est parfois son propre producteur. Il ne s’engage sur un film que s’il a un contrôle total. Pour éviter les mauvaises surprises, il monte ses films pendant le tournage.

On pourrait revenir film par film sur sa carrière mais le temps nous manque. Il y a des chefs-d’œuvre incontournables: La Charge victorieuse (The Red Badge of Courage, 1951), The African Queen (1952), Freud (1962), La nuit de l’Iguane (The Night of the Iguana, 1964), Reflets dans un œil d’or (Reflection in a Golden Eye, 1967), Promenade avec l’amour et la mort (A Walk with Love and Death, 1969), La lettre du Kremlin (The Kremlin Letter, 1970), Fat City (1972), Juge et hors-la-loi (The Life and Times of Judge Roy Bean, 1973), L’homme qui voulu être roi (The Man Who Would Be King, 1975), Le Malin (Wise Blood, 1979), Au-dessus du volcan (Under the Volcano, 1984), Les gens de Dublin (The Dead, 1987).

The Dead Angelica Huston

L’impressionnante filmographie de John Huston recèle bien d’autres perles. Signalons aussi que John Huston fut acteur pour d’autres cinéastes, que ce soit pour de grands artistes du 7e art, Orson Welles et Roman Polanski, ou pour de petits artisans du cinéma de série B : Ovidio G. Assonitis, Roger Corman ou Umberto Lenzi…

Il est grand temps de revisiter cette œuvre magistrale, la rétrospective de la Cinémathèque Française est l’un des événement de cette saison 2016. Immanquable!

Quand on aime le cinéma on aime John Huston.

Rétrospective John Huston du 8 juin au 31 juillet à la Cinémathèque française.

La rédaction