Quand siffle la dernière balle – Henry Hathaway

Bobby Jay Jones (Robert F. Lyons), accompagné de Skeeter (John Chandler) et Pepe (Pepe Serna), a rendez-vous avec Sam Foley (James Gregory), dans sa riche propriété de Gun Hill. Foley lui propose cinq pièces doubles Eagles pour surveiller Clay Lomax (Gregory Peck) qui doit sortir du pénitencier de Canyon City après une longue peine. Surtout, Jones ne doit pas le tuer. Lomax quitte le pénitencier avec une idée en tête se venger de l’homme qui l’a trahi. Le train s’arrête à la petite gare de Weed City, Lomax en descend…

Quand siffle la dernière balle est le dernier western d’Henry Hathaway et son avant-dernier film. Le film reprend des ingrédients qui ont fait le succès de Cent dollars pour un shérif, un homme bougon avec une adolescente collée ses basques. Dans Quand siffle la dernière balle, Gregory Peck « remplace » John Wayne, et de shérif, le personnage principal devient hors-la-loi, et l’adolescente se métamorphose en une petite fille. Henry Hathaway retrouve à la production Hal B. Wallis et Marguerite Roberts au scénario l’équipe gagnante du précédent western.

Toutefois, l’approche est différente, plus directement violente avec le personnage de Bobby Jay Jones véritable psychopathe. On pourrait le croire échapper d’un asile d’aliénés, ou pour être plus prosaïque, simplement dans la tendance commerciale du début des années 70 après « l’explosion » de violence de La Horde Sauvage de Sam Peckinpah et des westerns européens. C’est oublié un peu vite que Henry Hathaway a souvent mis en scène la violence poussée jusqu’au sadisme, les exemples ne manquent pas dans son œuvre : l’impressionnante séquence de tortures des Trois Lanciers du Bengale (The Lives of a Bengal Lancer, 1935) ou l’infirme poussée dans l’escalier dans Le Carrefour de la mort (Kiss of Death, 1947).

Dans Quand siffle la dernière balle, un autre infirme va connaître une fin tout aussi violente. Ce n’est plus Richard Widmark, mais Richard F. Lyons qui incarne le psychopathe. Lyons est moins subtil, plus brut, au point de donner l’impression d’en faire trop. Ce qu’il y a de formidable dans les films d’Hathaway, c’est que tout peut arriver, qu’il ne recule devant rien. Henry Hathaway réussit une succession de scènes malsaines dans le bar bordel de Weed City. Bobby Jay Jones et ses deux acolytes, s’acharnent sur le propriétaire, un infirme, et surtout une prostituée jusqu’à la violer dans une chambre (hors champ). Ses excès de virilismes, absolument bestiales du gang Jones, contraste avec la relation entre Lomax et la petite fille d’où émerge une douceur certaine. A tel point que Lomax en finit presque par perdre de vu l’idée de vengeance.

Gregory Peck donne une réelle épaisseur à son braqueur de banques. Il a l’expérience nécessaire pour maintenir l’intérêt d’une scène. A 55 ans, il domine son art. Gregory Peck sortait de l’un des chefs-d’œuvre, méconnu, des années 70, Le pays de la violence (I Walk the Line, 1970) de John Frankenheimer, quand il retrouve Henry Hathaway après l’imposant Conquête de l’Ouest en Cinerama. Sa carrière durant les années 70 est intéressante, certes avec un nombre limité de films. Ainsi, on le retrouve dans Un colt pour une corde (Billy Two Hats, 1974) western de Ted Kotcheff, La Malédiction (The Omen, 1976), formidable film d’horreur de Richard Donner, Mac Arthur, le général rebelle (MacArthur, 1977) de Joseph Sargent et en Dr Josef Mengele dans Ces garçons qui venaient du Brésil (Boys From Brazil, 1978) de Franklin J. Schaffner.

Hathaway est un maître des extérieurs, il ajoute un aspect automnal au film en plaçant au premier plan ou de manière particulièrement visible les feuillages rouge/jaune. Le bruissement des feuilles donne une impression de quiétude contredite par la rage des hommes. La couleur est particulièrement bien utilisée. Hathaway avait été le premier à sortir le Technicolor des studios pour les forêts de La Fille du bois maudit (The Trail of the Lonesome Pine, 1936). Quand siffle la dernière balle est un western plaisant, pas le plus important d’Hathaway, mais réaliser avec un grand savoir-faire.

Fernand Garcia

Quand siffle la dernière balle une édition, combo (Blu-ray – DVD), Sidonis Calysta dans l’incontournable collection Silver, Westerns de légende. Le film bénéficie d’un superbe master HD aux éclatantes couleurs du Technicolor. En compléments : Une présentation du film par Patrick Brion « Si Henry Hathaway a été le cinéaste de tous les genres possibles, on oublie que Gregory Peck a été l’interprète de tous les genres possibles » (7 minutes env.). Une deuxième présentation par Jean-François Giré (11 minutes).

Quand siffle la dernière balle (Shoot Out) un film de Henry Hathaway avec Gregory Peck, Pat Quinn, Robert F. Lyons, Susan Tyrrell, Jeff Corey, James Gregory, Rita Gam, Dwan Lyn, Pepe Serna, Arthur Hunnicutt, John Chandler, Paul Fix… Scénario : Marguerite Roberts d’après The Lone Cowboy de Will James. Directeur de la photographie : Earl Rath. Décors : Alexander Golitzen et Walter Tyler. Montage : Archie Marshek. Musique : Dave Grusin. Producteur : Hal B. Wallis. Production : Universal Pictures. Etats-Unis. 1971. 95 minutes. Technicolor. Format image : 1,85 :1. 16/9e Son : Version originale avec ou sans sous-titres français et Version française. DTS-HD. Dual mono. Tous Publics.