Sélection Officielle – Festival de Cannes, 2025

Anora était un choix judicieux de la précédente édition. Le film de Sean Baker exhalait un véritable parfum de liberté, avec un scénario affranchi des conventions et des valeurs qu’il faudrait systématiquement ériger en priorité. Anora, oscillant entre Fellini et Cassavetes, avait de quoi agacer : « Y en a marre du cul de la brune ! » a répliqué une vieille critique lors de la cérémonie du SFCC. Ce même scénario n’aurait sans doute jamais franchi le barrage des lecteurs des commissions d’aide ou de subvention en France.

Palme d’or en poche, et auréolé d’Oscars, Anora aurait pu servir de moteur, incitant à fuir le suivisme sociétal et l’appauvrissement de l’imaginaire. Mais il n’en sera rien. L’imaginaire et l’expérimentation ne sont pas à l’ordre du jour — il suffit de se rappeler l’accueil réservé à Megalopolis, film foutraque, excessif, bancal, mais débordant d’inventions. À croire que toute la presse s’était précipitée salle Lumière avec pour seul but de valider les jugements négatifs des exécutifs hollywoodiens. Il y avait dans cette réception une forme de haine pour Francis Ford Coppola l’un des plus grands cinéastes du XXe siècle.

Autre rejet, plus feutré : celui des Linceuls de David Cronenberg, cinéaste qui n’a jamais cessé d’avancer, d’explorer, d’être en avance sur son temps. Cronenberg est pourtant l’un des auteurs les plus pillés par ceux-là mêmes qui peinent à imaginer autre chose. Et Cannes nous en propose chaque année, de ces suiveurs déguisés en auteur.

Évidemment, le choix de l’époque s’est porté sur Emilia Perez : toutes les cases étaient cochées. Mais ce qui devait être un chemin vers la béatification trans s’est mué en chemin de croix à l’international. Rejet violent du public latino-américain, polémiques amplifiées par d’anciennes déclarations de son actrice principale… Sur le papier, le 78e Festival de Cannes s’annonce bien dans le rang, avec l’éternel retour des Dardenne, apôtres de la bonté compassée. Une édition qui semble déjà rejouer la même partition, entre bons sentiments et calculs de programmation. À suivre, du 13 au 24 mai 2025.

Film d’Ouverture :

PARTIR UN JOUR d’Amélie BONNIN 1er film (France) – Hors Compétition

En compétition

THE PHOENICIAN SCHEME de Wes ANDERSON (États-Unis – Allemagne)

EDDINGTON d’Ari ASTER (Etats-Unis)

JEUNES MÈRES de Jean-Pierre et Luc DARDENNE (France – Belgique)

ALPHA de Julia DUCOURNAU (France – Belgique)

RENOIR de HAYAKAWA Chie (Japon – France – Singapour – Philippines – Indonésie)

THE HISTORY OF SOUND d’Oliver HERMANUS (États-Unis)

LA PETITE DERNIÈRE de Hafsia HERZI (France – Allemagne)

SIRAT d’Oliver LAXE (France – Espagne)

NOUVELLE VAGUE de Richard LINKLATER (France – États-Unis)

DEUX PROCUREURS de Sergei LOZNITSA (Allemagne – France – Pays-Bas – Lettonie – Roumanie – Lituanie – Ukraine)

FUORI de Mario MARTONE (Italie – France)

O AGENTE SECRETO (L’AGENT SECRET) de Kleber MENDONÇA FILHO (Brésil – France)

DOSSIER 137 de Dominik MOLL (France)

UN SIMPLE ACCIDENT de Jafar PANAHI (France)

THE MASTERMIND de Kelly REICHARDT (États-Unis)

LES AIGLES DE LA REPUBLIQUE de Tarik SALEH (Suède – France – Danemark – Finlande)

SOUND OF FALLING de Mascha SCHILINSKI (Allemagne)

ROMERÍA de Carla SIMON (Espagne)

SENTIMENTAL VALUE de Joachim TRIER (Norvège – Allemagne – Danemark – France – Suède)