Oncle Boonmee – Apichatpong Weerasethakul

Quand les souvenirs disparaissent peu à peu

Aux pouvoirs extraterrestres, le dernier film d’Apichatpong Weerasethakul sonne comme une formule magique. On n’est pas surpris que Tim Burton, le cinéaste d’une originalité aussi généreuse, lui décerne le prix suprême du festival de Cannes.

 Oncle Boonmee celui qui se souvient de ses vies antérieures résume la ligne narrative de l’histoire, limpide et simple, mais au sujet beaucoup plus compliqué : mémoire, souvenirs, transmigration des âmes. C’est une dernier voyage jusqu’à la grotte de son premier existence préhistorique afin de se souvenir. Boonmee est personnification de la région Nabua au Nord-est de Thaïlande, où les souvenirs disparaissent, où Boonmee est une sorte de gardien des vestiges de l’histoire violente. Pourtant le film n’est dégage une paix intérieure, qui peut être une manière la plus efficace de combattre la censure omniprésente du pays.

 Weerasethakul s’est inspiré des deux ouvrages, Waiting for the Macaws de Terry Glavin sur la disparition des espèces, des langages et des mythologies, et le deuxième, écrit par un moine sur un homme qui révèle son expérience de la réincarnation. La jungle, propriétaire de ses vies visibles et invisibles, est une toile vibrante de l’œuvre de notre cinéaste et possède une puissance absorbante. Ici le temps reste suspendu, il n’y plus ni avant ni après, ce qui efface toutes les limites entre le jour et la nuit, l’homme et l’animal.

 Comme Boonmee remplit sa mémoire par les visions de ses vies passées, le cinéma crée le rêve, puis son souvenir. Le film possède un rapport direct au cinéma et son concept. En ce sens, l’auteur a réussi à poser un regard sur les réalités éphémères avec sa propre ponctuation. On ne peut pas aller contre l’évidence d’un artiste.

Rita Bukauskaite

Oncle Boonmee (celui qui se souvient de ses vies antérieures) (Lung Boonmee raluek chat)  d’Apichatpong Weerasethakul avec Thanapat Saisaymar,  Jenjira Pongpas, Sakda Kaewbuadee, Natthakarn Aphaiwonk. Origine : Thailande. Durée : 114 mn. Palme d’Or 2010.

DVD disponible chez Pyramide Vidéo.