Le Maître du monde – Lee Sholem

Le Maître du monde est une série B de science-fiction qui faisait le bonheur des enfants et adolescents des années 50. Le type même du film qui, après la salle, va connaître une seconde carrière sur le petit écran avant de revivre en DVD. Tobor le robot, le véritable héros du film,  a de quoi mettre en joie les petits cinéphiles. Pourtant, Le Maître du monde se veut un peu plus qu’un simple film pour enfants.

Le Dr Ralph Harrison est scientifique, il exerce ses talents pour une agence gouvernementale, la Commission Civile des Vols Interplanétaires (sorte d’ancêtre de la NASA). Harrison, homme particulièrement intègre et plein de bon sens, s’oppose à sa hiérarchie sur un point. Il refuse de mettre en danger les pilotes d’essai dans le but d’expérimentation pour la conquête spatiale. Il ne veut pas faire comme les ennemis de l’Amérique les Soviétiques, jamais nommément cités. Les communistes n’hésitent pas à mettre en danger leurs pilotes, ce qui prouve leur mépris de la vie humaine. Harrison fait la connaissance d’un collègue, le Professeur Nordstrom. Celui-ci vient de mettre au point un robot, Tobor, capable de remplacer l’homme dans des voyages intersidéraux. Harrison intrigué décide de collaborer avec son ainé. Le Professeur organise dans sa maison, qui cache une pièce dédiée à ses recherches, une présentation officielle à la presse spécialisée. Harrison fait la connaissance de la fille du Professeur, une jeune veuve, et de son petit-fils surdoué surnommé Bricole. Une idylle lie très vite Harrison et la jeune veuve… Cette « famille » va devoir faire face aux sournoises attaques d’une cellule d’espions…

Le scénario est des plus conventionnels. Le Maître du monde véhicule l’anticommunisme habituel des films et livres de SF des années 50 avec ce côté paranoïaque, de l’ennemi intérieur, du maccarthysme. Sinistre période qui déteint jusqu’au cœur du cinéma populaire. En ce sens le film est à son échelle un témoignage des peurs distillées au sein de la population. Il prône une attention de chaque instant: l’ennemi rôde, c’est peut-être votre voisin, et exalte des valeurs conservatrices. La jeune femme est la veuve d’un soldat mort en Corée. Son fils est un exemple pour la jeunesse: intelligent, il est tout entier au service de la science, tout comme la science est au service de la grandeur et de la réussite du pays.

Aujourd’hui, ce qui retient l’attention c’est le fameux Tobor (robot inversé). Au titre français, nous préférons l’original – Tobor the Great. Amusant assemblage de composantes électroniques et de métal, Tobor éprouve aussi des « sentiments synthétiques » sur une plage assez étendue, de la compassion à la peur. Il est le clou du film, que la publicité sera judicieusement exploitée dans une série d’affiches particulièrement « osées » jouant sur un érotisme totalement absent du film. Non, Tobor ne sauve pas, hélas, de jeunes femmes dénudées.

Lee Sholem, réalisateur prolifique, est un spécialiste des films à petit budget. Sholem tournait si vite qu’il était surnommé « Roll’em Sholem ». Le robot Tobor est l’œuvre de Robert Kinoshita qui créera aussi le fameux Robby, le robot de Planète interdite. Un petit pas pour le cinéma mais un pas de géant pour la robotique.

Fernand Garcia

Le Maître du monde est disponible dans le coffret prestige La Guerre des robots ! édité par Artus films. Outre Le Maître du monde, on trouve trois autres petits classiques de la science-fiction Création of the Humanoids, Objectif Terre et Cyborg 2087. Inclus dans le coffret un livret Alerte aux Robots ! le robot au cœur de l’âge d’or de la SF cinématographique américaine, petite historique de ces machines à forme humaine, illustré d’affiches et de photos où l’on retrouve Robby et Gort (du Jour où la terre s’arrêta) et bien d’autres stars mécaniques. Quatre belles reproductions de Lobby cards des films du coffret complètent cette sympathique édition.

Le Maître du monde (Tobor the Great) un film de Lee Sholem avec Charles Drake, Karin Booth, Billy Chapin, Taylor Holmes, Steve Geray, Henry Kulky… Scénario : Philip MacDonald d’après une histoire de Carl Dudley. Directeur de la photographie : John L. Russell, Jr. Décors : Gabriel Scognamillo. Montage : Basil Wrangell. Effets spéciaux : Howard et Theodore Lydecker. Musique : Howard Jackson. Producteur : Richard Goldstone. Production : Dudley Pictures Corporation – Republic Pictures Corporation. Etats-Unis. 1954. 73 mn. Noir et blanc. Format image 1.37 :1. Radio 16/9e VOSTF et VF. Tous publics.